Au Cinéma ce soir… Et tous les autres jours de la vie…
« Le cinéma est très probablement le seul endroit au monde dans lequel un homme peut pleurer, même sangloter sans la moindre honte » confie Jean-Marc Luisada.
L’artiste est bien davantage qu’un cinéphile. Il devient lui-même un créateur lorsqu’il multiplie les rencontres entre la musique, l’image et le texte. Parce qu’il est d’abord, au piano, un narrateur, il s’inspire des histoires du monde, des plus banales aux plus extraordinaires pour enrichir son propre univers, celui qu’il transmet lorsqu’il est sur scène, face au public. En vérité, son propre jeu et celui de ses élèves - car il est l’un des professeurs les plus recherchés - est avant tout “rétinien”. En effet, il capte les vibrations de la lumière, l’onde des mouvements, les dialogues devenus muets au piano et pourtant partagés à deux mains. On ne sait, alors, si l’image s’imprime sur la partition ou bien si celle-ci se reflète dans chaque plan imaginé par le réalisateur. L’œuvre finale, projetée ou éditée est d’une logique implacable ; elle invite au voyage dans l’ineffable, à la confession comme une mazurka de Chopin, un silence de Bergman. Tout compositeur, tout réalisateur est le signataire de son propre climat, de son odeur presque qui colle à la pellicule, et les films, les plus beaux, ceux qui serrent la gorge et font rire aux éclats, distillent une atmosphère unique, tout comme une page aux cordes seules de Mahler. L’immortalité en à peine plus d’une heure… Chaque long-métrage accompagne ainsi une destinée humaine. Elle revit sous tous les costumes, les langues et les latitudes : Mahler et Mort à Venise de Visconti, Brahms et les Amants de Louis Malle, Gerhswin et Manhattan de Woody Allen, Wagner et Ludwig de Visconti, Rota et Casanova, mais aussi La Dolce Vita de Fellini, Chopin et Cris et Chuchotements de Bergman, Joplin et l’Arnaque de Roy Hill, Rendez-vous à Bray de Delvaux, Mozart et Le Vent de la Plaine de John Huston… Ces instants dramatiques et heureux à la fois représentent bien davantage que des parcelles de vie. Ils nourrissent notre âme, à l’égal des plus grands textes dont on ne souvient qu’imparfaitement. Peu importe. De telles musiques nous font espérer en la grandeur de l’humain, à ses rêves, à ses espoirs déçus, parfois, mais fous, si souvent.